Un week-end ordinaire à la Débrouille Cie.
Samedi 25 septembre 2010 pour La Journée de l'Environnement. à Rungis nous avons monté notre piège à gosses.
Pour cela nous avons le plan d'enfer qui marche à tous les coups :
Nous prenons une grande tente, nous la coupons en 2.
Côté boutique nous jetons quelques trucs en pneu, en boîte de sardines, en sacs plastiques tricotés venant de partout.
Les parents sont scotchés, s'extasient, se renseignent, achètent à tour de bras ces objets insolites et superbes.
Côté atelier nous mettons sur les tables d'énormes ciseaux, des cutters redoutables, des clous mortels et des marteaux assassins pour travailler des matériaux pourris car - c'est connu - on n'attrape pas les mouches avec du vinaigre
On explique deux ou trois trucs élémentaires, les gamins s'étonnent et tombent dans le panneau s'abîmant dans des tâches précises, rigoureuses où ils s'appliquent, opiniâtres, perdus pour leurs parents et le reste du monde.
Cette jeune-fille en rouge là, dites moi si elle n'est pas abîmée...
Regardez- la franchement, plus abîmée tu meurs mais que font les parents ?!?
S'abîmer et ne rien abimer c'est ça l'exploit et la subtilité de la langue française...
Devant, la table d'exposition des ateliers couverte de petits moulins-à-vent, de poule, de scorpion, d'éléphant et d'hommes courants en fil de fer les attirent,
<< ça se vend ? peuvent-ils dire.
- Oui, 12 000€ pièce, sinon, ça se fabrique. Je peux t'apprendre et c'est gratuit...>>
Les Hélicos à Sékou pendus en grappe les intriguent.
Le test qu'on leur laisse faire tout autour de la tente les jettent immanquablement dans nos rets.
Nous les précipitons dans nos caisses de bananes remplies de déchets, de débris et d'usure pour les user encore puisque ça, c'est possible avec nos outils neufs et bien appropriés.
Nous le savons. Ils le sauront dans 20 minutes nous pouvons le promettre.
Ainsi scotchés, nous n'avons plus qu'à les mettre au boulot et ça turbine croyez-moi. Sans moufter.
(Sans se blesser non plus, jamais, remarquez bien...)
Regardez encore cette jeune-fille en rouge, ne la perdez pas des yeux mais vous n'existez plus pour elle...
Elle est à ce qu'elle se fait. Nous avons tout fait pour et n'avons maintenant rien à faire qu'a voir faire.
deux, trois, cinq, chacun vient faire ce qu'il veut : bijoux en chambre-à-air, Hélico en boîte de conserve ou moulin-à-vent en capsule et bouchon.
<< Non mademoiselle, la pince, c'est pas comme ça...
Vous rappelez-vous comment j'ai fait ?
...comme ça, oui.>>
<< Pour taper sur un couvercle de boite sans se taper les doigts il y a un truc simple : On ne met pas les doigts SOUS le marteau ni le marteau SUR les doigts. essayez ça...>>
(ça marche.)
<< Sinon, pour trouver le centre d'un cercle, on peut faire comme ça : >>
( rien d'autre à dire. Plus rien a faire.
Le mien a marché, le sien marchera...)
Ils'en vont, d'autres viennent qui les ont vu passé...
Un moulin pour lui, et s'il a encore dix minutes on fait un socle superbe avec ce qu'on a avec un cintre détordu / retordu.
Ils repartent et font tourner le truc qu'ils viennent de fabriquer.
Ils pilotent comme des as mais on peut croire en les voyant que c'est plutôt le truc qui les fait tourner, les fait marcher et courir même...
Lui a tout expliqué à son père incrédule qui sait, lui, ce qu'est un engrenage et sa complexité.
C'est ça que son fils lui apporte en roulant mine de rien. << Hé t'as vu ? c'est moi qui l'a fait !!! >>
Ils tournent un peu, ils disent merci puis on les perd de vue, repartis au volant de leurs drôles de machines vers des parents amusés, contents peut-être d'avoir bénéficié d'une demie heure de baby-sitters gratuits, gracieux, inventif, astucieux et à l'air sommes toutes, plutôt satisfaits de leur agréable journée à l'organisation et à la réception impeccable.
Le soir même nos partions en Normandie, à la Louveterie de Thuit-Hébert où à lieu le festival N'en jetez plus! qui réunit des artistes et artisans responsables et de bonne compagnie.
Au réveil chez nos hôtes, nous avons rencontré cette danseuse de Sékou s'agitant furieusement devant un Pinocchio assis, un peu colère, habilement sculpté pour faire des articulations aux coudes, aux hanches et aux genoux, tourner la tête, les mains et les pieds.
Travail de haute précision qui a su ne pas effacer l'origine rustique du matériau en lui laissant sa peau d'écorce.
C'est l'oeuvre du propriétaire d'ici - un ex-ingénieur, ça se sentait sous l'écorce - qui me dit avoir fait ça un peu pour rigoler avec des bûches destinées au poêle-à-bois.
Dommage que l'idée n'ai pas suivi de faire aussi Gepetto et la fée bleue, le poisson géant, Mangiafuoco et les ânes mais non, tant pis. Sékou lui, des danseuses il en a fait plus de 300 et son patron d'origine est dans un atelier de Bamako, opérationel et reproductible à l'envie.
Mais Sékou à Paris avec des boîtes de conserve qu'on lui met dans la rue et Michel ici avec les bûches entassées près du poêle+, sans se connaître ni connaître le travail de chacun comme je le vois ici, intimement rassemblé, ils ont fait le même chemin et produit quelque chose qui est encore là.
ils se sont débrouillés avec ce qu'ils avaient à leurs pieds pour le mettre sous la main et faire vivre tout ça.
C'est un taf...
Nous aussi nous tafions. En live.
Dans un champs d'herbe grasse, des tentes, une grande pour nous, coupée en deux - nous avons l'habitude - un côté boutique et l'autre atelier.
Devant l'atelier, une palette trouvée ici pour mettre en scène nos pauvres matériaux et faire en sorte qu'ils attirent le promeneur.
des moulins-à-vent, des citrons à pattes, des trucs et des machins...
Derrière, une caisse pour chaque activité avec de la matière et des outils appropriés.
Dessous, des réserves.
Au milieu une table, trouvée ici aussi avec ce vert céladon du meilleurs effet, posée sur deux tréteaux et encombrés d'outils.
Nous avons du flouter les visages de ces gosses pour de bêtes histoires de droits à l'image, tant pis mais nous l'avons vu, nous, l'attention dans leurs yeux, l'amusement qui venait du bla-bla et des rires bon enfant.
Il est sorti toutes sortes de choses chacun choisissant son sujet et sa matière.
Nous n'avons fait que quelques photos....
Ainsi mademoiselle qui fit un arbre que nous pourrions noter ainsi :
10/10 pour l'imagination et la torsion du fil de fer.
10/10 pour le perçage et le façonnage du couvercle de boîte.
+ 3 points pour la présentation sur ce fond idoine.
Total 23/20. Très bien, à refaire.
La journée est passée comme ça et en rentrant pour la nuit dans cette belle maison, nous eûmes ce doux sentiment de partir en week-end...
Pendant ce temps, deux des compagnons de notre Compagnie étaient à Feigneux dans le Nord pour la manifestation Jour De Fête et faire avec d'autres gosses à peu près la même chose que nous.
Un week-end ordinaire à la Débrouille Cie.